Orazio Puglisi

Le beau ! Quoi d'autre ?

Les Pythagoriciens du Vè Siècle

Les pythagoriciens de la même époque se partagent aussi : les acousmatiques forment un ordre purement religieux où la pratique et la croyance restent le principal, tandis que les mathématiciens cherchent seulement le développement scientifique des mathématiques, de l’astronomie, de la musique, c’est à-dire des sciences qui vont être considérées par Platon comme le point de départ de la philosophie ; ils forment le groupe très mal connu dont le chef paraît avoir été Philolaüs,

 

et qui comprend Cébès et Simmias, que Platon nous représente dans le Phédon conversant avec Socrate, Archytas de Tarente, chef politique de son pays,

 

 

qui fut l’ami de Platon et le roi philosophe selon son goût, Timée de Locres, par qui Platon fait exposer sa propre physique : de ce milieu intellectuel où s’esquissent les dogmes du platonisme, il est bien impossible de faire une histoire précise. Nous n’avons pour tout document certain, à part les fragments de Philolaüs dont l’authenticité est contestée, que les textes où Aristote expose les doctrines, des pythagoriciens, sans préciser davantage. Un trait doit en être retenu, c’est leur émancipation à peu près complète de la cosmogonie ionienne ; dire en effet, comme ils le font, que les choses sont faites de nombres, cela ne peut avoir le même sens que de dire qu’elles sont faites de feu ou d’air. De quelque manière qu’on imagine ces nombres, comme des rangées de points ou comme des grandeurs, ils ne sont point comme le feu ou l’air, des substances capables de se transformer en d’autres, ils supposent un ordre fixe et permanent. D’où le caractère de leur cosmologie qui ne comporte point de cosmogonie à la manière ionienne, mais, se contentant de décrire un ordre, un cosmos, tend à devenir, au lieu d’une physique, une pure astronomie mathématique. Dans leur système du monde, le centre est occupé par un feu autour duquel gravitent une première planète appelée l’antiterre, puis la terre, qui passe au rang de planète, puis le soleil, les cinq planètes et les étoiles fixes ; de ce système, rien n’indique qu’ils aient cherché l’origine; bien plus, la place qu’ils assignent à la terre exclut complètement les idées des Ioniens qui, ayant l’esprit plus ou moins hanté par l’assimilation des phénomènes célestes aux phénomènes météorologiques, supposent invinciblement par là même la terre immobile au-dessous de la voûte nuageuse. Quant à l’imagination de ces réalités astronomiques inaccessibles à l’observation, l’antiterre et le feu central qui éclaire l’hémisphère terrestre que nous n’habitons pas, l’une, le feu central, n’a aucun caractère cosmogonique, mais est destinée à donner de la lumière solaire une explication déjà rencontrée chez Empédocle, l’autre, l’antiterre, à expliquer les éclipses par l’interposition de ce corps opaque entre le feu central et la lune ou le soleil. Ce pythagorisme nouveau paraît donc être, en un sens, une véritable libération de la physique dynamique et qualitative des Ioniens, qui donnait, avec les derniers anaxagoréens et héraclitéens, des marques d’épuisement. Il dut y avoir, vers cette époque, une floraison d’hypothèses sur l’ordre et les mouvements des corps célestes, mais il ne nous en reste que des traces; une d’entre elles est peut-être celle du pythagoricien Hicétas, qui explique le mouvement diurne par la rotation de la terre sur son axe; nous le connaissons par un passage de Cicéron qui, bien des siècles plus tard, frappa l’attention de Copernic.

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